En 2019, Vincent Defrasne a créé AYAQ, une marque de vêtements de montagne éco-conçus et fabriqués en Europe. Un nouveau défi pour l’ancien biathlète, installé dans le Haut-Doubs, qui conjugue développement économique et engagement écologique.
« Je me suis lancé aussi pour le frisson, l’intensité, l’épopée avec une équipe ». Quand Vincent Defrasne évoque son aventure entrepreneuriale, les références à la compétition et au sport de haut-niveau qu’il a pratiqué jusqu’en 2010 pointent vite le bout des spatules… Natif de Pontarlier, aujourd’hui installé aux Grangettes près du lac Saint-Point, le biathlète a décroché le graal en 2006 avec un titre olympique en poursuite aux Jeux de Turin. Son palmarès international comprend également deux médailles de bronze olympiques, cinq médailles en championnats du monde et un petit globe de cristal.
Quand il range skis et carabine, à 33 ans, Vincent Defrasne garde un pied dans le monde sportif. Il commente des épreuves de biathlon pour la télévision et devient, pendant cinq ans, coordonnateur du programme « athlètes modèles » au Comité international olympique (CIO). Les athlètes modèles, ce sont d’anciens champions qui s’engagent à partager leur expérience avec des jeunes sportifs, lors des Jeux olympiques de la jeunesse. Mais le Franc-Comtois souhaite aussi « faire quelque chose de plus altruiste, sans trop savoir quoi. J’avais ce besoin-là, à l’issue d’une carrière d’athlète égocentrée ». Alors, l’entreprise Somfy, qui était l’un de ses sponsors, lui confie la direction de sa fondation, en parallèle de ses activités au CIO. Sa mission : aider les personnes mal logées, en France et à l’étranger.
Inspiration inuit
Changement de trajectoire en 2019. L’ancien champion olympique veut créer sa propre entreprise. Il a « envie d’une épopée entrepreneuriale ». Surtout, il a un projet, en maturation depuis plusieurs années : commercialiser des vêtements techniques, adaptés à la pratique des sports de montagne, et dont la conception serait respectueuse de l’environnement. « J’ai toujours été attiré par le côté technique des vêtements et je suis venu petit à petit à l’écologie. À partir de 2015-2016 et des épisodes de canicule, je me suis rendu compte que le réchauffement climatique était flagrant », rembobine-t-il.
Pour concrétiser son idée, Vincent Desfrasne écoute des heures de podcast sur l’entreprenariat et le textile, rencontre de nombreux interlocuteurs. Il constitue son équipe, embarquant avec lui Rodolphe Aymer, directeur opérationnel issu de l’industrie du luxe, la Pontissalienne Chloé Pellegrini, ingénieure textile et skieuse nordique ainsi qu’un bureau de design suisse. Malgré la crise sanitaire, sa première collection, dédiée au ski de randonnée, arrive dans les magasins en décembre 2020.
Nom de la marque : AYAQ, un mot inuit désignant la neige sur les vêtements. « On a trouvé ça beau, poétique et efficace. C’est aussi une façon de dire aux skieurs européens que leur comportement peut avoir un impact sur l’environnement de ces populations du Grand Nord, proches de la neige et de la glace. » AYAQ, ce sont donc, à la fois, des vêtements techniques, avec des fonctionnalités – par exemple une doudoune qui s’ouvre sur les côtés pour s’enlever facilement – et écologiques. Les matières, recyclées ou naturelles, sont produite en Europe (France, Italie, Allemagne, Portugal). Et la fabrication a été confiée à une usine portugaise, exemplaire aux plans social comme environnemental.
Éco-conception profonde
« Pour le moment, il y a encore deux composants pour lesquels on ne peut pas s’approvisionner en Europe car ils n’y a pas de fournisseurs : la laine vierge arrive de Nouvelle-Zélande et les zips imperméables d’Asie, reconnaît le chef d’entreprise basé aux Grangettes. Mais notre volonté, à terme, c’est bien de pouvoir rapatrier 100 % de nos matières premières en Europe. On est dans une éco-conception profonde, à chaque étape de notre réflexion. »
Revendiquant un positionnement haut de gamme, la marque propose aujourd’hui une quinzaine de références « hiver », pour hommes et femmes. La distribution s’effectue en ligne et chez des revendeurs spécialisés, principalement en stations et dans des villes de moyenne montagne. Vincent Defrasne et son équipe -ils seront sept fin 2021- s’emploient à développer ce réseau commercial, en France et en Suisse. Avant d’investir l’arc alpin et la Scandinavie. AYAQ va également présenter, à partir de 2023, une collection « été » destinée aux randonneurs en montagne, sportifs ou contemplatifs.
Si le lancement de la marque a été plutôt réussi, l’ex-athlète sait que la victoire dans l’industrie textile ne s’obtient qu’à l’issue d’une longue et éprouvante course de fond. Le secteur est concurrentiel et l’écosystème complexe. « Oui mais c’est passionnant, répond Vincent Desfrane, avec un grand sourire. Et puis la concurrence, j’aime bien ça… » D’ailleurs, le champion a toujours de l’ambition à revendre : « à terme, le rêve, c’est de devenir le fleuron de Bourgogne-Franche-Comté dans l’univers du vêtement technique ! » Le biathlète aura alors parfaitement atteint sa cible.
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