Premières assises régionales du travail

Mercredi 12 juin, la Région organisait ses premières assises régionales du travail. Organisées sous la forme de conférences-débat, elles proposaient d’explorer les problématiques liées aux métiers de bouche et du nucléaire. Des secteurs en tension. Objectif : trouver les solutions pour rapprocher entreprises, formations et demandeurs d'emploi. Pour le bonheur de tous.

C’est un sujet passionnel et passionnant ; clivant aussi ! La Région organisait mercredi 12 juin 2024 à Dole (39) la première édition des assises régionales du travail.

A la tribune, s’installent une première lignée d’intervenants venus parler des évolutions du travail dans la filière nucléaire. Une filière sans doute trop méconnue en Bourgogne-Franche-Comté, qui fait pourtant vivre 23 000 salariés. C’est 15 % des emplois industriels de la région. La bonne nouvelle, c’est que c’est un secteur en pleine expansion, qui recrute à tour de bras : « On va avoir besoin de 12 000 recrutements dans les années à venir » confirme Justine Marlot, chargée de mission du pôle de compétitivité Nuclear Valley (69). Alexandre Crétiaux, délégué CFDT chez Framatome (Chalon-sur-Saône, 1 300 salariés) confirme : « On a des volumes de recrutements de 200 à 250 pers par an : des soudeurs, des chaudronniers, … »

Quid de l’intérêt pour ces métiers dits difficiles ? « Contrairement à ce que l’on pense, les jeunes n’ont pas une si mauvaise image que ça des métiers du nucléaire ; ce sont plutôt les parents qu’il faut convaincre ! » affirme Justine Marlot. Laure Chouzet, proviseure du lycée Eugène Guillaume (Montbard - 21), spécialisé dans les formations aux métiers de l’industrie, nuance : « On se heurte tout de même à un désamours des jeunes pour les filières industrielles : alors on fait du sourcing dans les collèges pour faire découvrir les métiers de la métallurgie aux jeunes. On déconstruit les stéréotypes. On fait des travaux pratiques externalisés dans les entreprises partenaires pour que les jeunes manipulent des machines et se rendent compte que l’on n’est plus à l’aire de la révolution industrielle en termes de pénibilité du travail. »

La fin de l’artisan hyper-spécialisé ?
La deuxième table ronde de la journée est organisée autour d’une autre filière en tension : les métiers de bouche. Des métiers qui ont dû se réinventer en profondeur depuis la crise du COVID. « On n’est plus boulanger aujourd’hui : on est devenus des restaurateurs » confirme Thomas Donze, propriétaire de deux boulangeries sur le secteur de Dole (39). Le pain n’est plus la raison première de se rendre chez le boulanger : « la partie snacking a explosé depuis trois ans. C’est aujourd’hui 40 % de notre chiffre d’affaires. »
Même constat au sein de la boucherie-charcuterie Brelot (Poligny - 39). Néo-retraité, Yves vient de confier les rênes de l’entreprise à son fils, qui doit composer avec les nouvelles habitudes des consommateurs : « La vente de viande crue a énormément baissé, mais on compense avec la viande cuite et transformée en plats cuisinés. Aujourd’hui, l’équipe se compose de deux bouchers, un charcutier, mais aussi un cuisinier et … un pâtissier. »

L’artisan hyper-spécialisé n’existe plus. Pour vivre, il doit élargir ses compétences. Du côté des formateurs, on en est conscient. Moins du côté des apprenants : « Un jeune qui arrive chez nous, il veut être diplômé très vite et partir travailler » avance Nathalie Lapicque, directrice du CFA de Vesoul (71). « Mais avec un simple CAP, ça va être difficile de percer dans le métier, de devenir un bon gestionnaire et espérer devenir un jour son propre patron. »  Ce que confirme Nadine Berthaut d’OPCO EP (21) : « Ce sont souvent des parcours de formation long. Minimum cinq ans pour devenir un boulanger ou un boucher complet. »

Pour attirer et fidéliser, là aussi les entreprises se sont réinventées. Dans les boulangeries Donzé, on ne travaille plus le dimanche et les jours fériés : « J’ai des anciens salariés 20/30 ans d’expérience qui font leurs premiers Noël en famille » explique Thomas. Ses 25 salariés sont répartis en deux équipes : 3h-11h puis 11h-19h. Ça marche : « On n’est plus sur des horaires à rallonge 6 jours sur 7 qui vous pourrissent votre vie » se félicite le chef d’entreprise. Et si c’était ça le bonheur au travail ?
Rendez-vous est d’ores et déjà pris l’an prochain pour des secondes assises régionales du travail.

La semaine à 4 jours : ça marche !

Sylvain Quidant, Co-fondateur de l’entreprise Cogitech (Marsannay-la-Côte - 21) - Photo Xavier Ducordeaux

Sylvain Quidant, co-fondateur de l’entreprise Cogitech (Marsannay-la-Côte - 21) - Photo Xavier Ducordeaux

Invité à intervenir en fin de journée, Sylvain Quidant ne fait ni dans le nucléaire, ni dans la boulangerie ou la charcuterie. Co-fondateur de l’entreprise Cogitech (Marsannay-la-Côte - 21), spécialisée dans la fabrication de produits haut de gamme pour le domaine du luxe, il a lui aussi été confronté à la fidélisation de ses salariés : « après la crise du COVID, on a ressenti de la « relâche », un manque de motivation dans les équipes » se rappelle le dirigeant.
A l’été 2022, en vacances sur la plage, il lit un article sur l’expérience réussie de la semaine de quatre jours dans une entreprise canadienne. Dès son retour, il propose à ses salariés d’y réfléchir. Trois semaines plus tard, le projet est ficelé. Les 39h sur cinq jours se transforment en 36h sur quatre jours. Soit 9h de travail quotidien : « C’est un vrai effort pour les salariés, car c’est plus soutenu. Mais ils y ont vite vu les avantages, avec des vendredis de libres pour certains, des lundis pour d’autres. » Sylvain précise que l’entreprise n’a connu aucune perte de productivité. Tout le monde s’y retrouve.

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